Les élèves qui arrivent en retard

On continue à explorer diverses méthodes pour améliorer notre gestion de classe, et aujourd’hui on aborde un problème spécifique : les élèves en retard.


Imagine : c’est le début de la leçon du jour. Tu as fait tout le nécessaire pour lancer ton cours de la meilleure des façons et tu as réussi à lancer tous tes élèves sur la tâche du jour, calmement et efficacement.

Jusqu’à ce qu’un retardataire arrive, tout sauf discrètement. Comment faire pour gérer ça ?



Pourquoi un élève est-il en retard ?

Avant de voir ce qu’il faut faire, il est important de se remémorer deux ou trois trucs :

  • On pense souvent que le retardataire fait exprès d’être en retard, qu’il aime ça, mais en réalité, il y a souvent des paramètres hors de son contrôle, surtout le matin, lorsqu’il arrive pour sa première heure de cours. Le retard de l’élève peut être dû à ses parents, à l’organisation matinale, à des frères et sœurs, à un vrai souci sur le chemin de l’école… Un élève en retard n’est pas toujours responsable de ce retard.
  • Il faut aussi être conscient que les élèves neurodivergents, c’est-à-dire qui présentent des troubles, ont souvent des challenges particuliers pour gérer leur temps, s’organiser, aller d’un point à l’autre. Pour certaines personnes, leur horloge interne ne fonctionne pas de la même façon, et la réalité du temps qui passe n’est pas appréhendée de la même façon. Avec ces challenges en plus, il peut être difficile d’être à l’heure !
  • Et puis pour certains élèves, peut-être qu’ils remplissent en priorité d’autres besoins, et tant pis si pour ça, ils seront en retard ! Ils peuvent faire le choix d’être en retard car ils doivent encore manger pour combler leur besoin de survie, ils préfèrent jouer dehors encore quelques minutes pour combler leur besoin de fun, ils restent avec un groupe d’amis pour qui le cours n’est pas prioritaire, pour combler leur besoin d’appartenance à un groupe, ou ils choisissent délibérément de ne pas aller en classe ou d’arriver en retard pour combler leur besoin de liberté. Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’un comportement est toujours présent pour combler un besoin ; ce n’est pas forcément un comportement admis par l’école, mais ça nous permet de mieux comprendre pourquoi certains élèves sont en retard.


Reconnaître tout ça nous permet de réaliser que le problème du retard n’est pas aussi tranché qu’il peut le paraître à première vue ; essayons de rester calmes et curieux par rapport aux retards de nos élèves.



Comment réagir face à un retard ?

Certaines choses sont hors du contrôle de nos élèves, et certaines choses sont hors de notre contrôle. Pour savoir comment réagir, il est important de se focaliser sur ce que nous pouvons effectivement contrôler ou influencer. Cette attitude, de se concentrer sur ce qu’on peut influencer, va nous permettre de rester beaucoup plus zen face à beaucoup de situations.


Quand un élève arrive en retard et que son arrivée est loin d’être discrète, quelle que soit la raison de son retard, on pourrait être fâché, frustré, demander la raison du retard, ce qui est tout à fait compréhensible vu toute l’énergie qu’on a mise dans le démarrage de la leçon pour tous les autres… Évidemment qu’on va être frustré par le retardataire. Mais si on montre un comportement frustré ou énervé, ça ne va faire qu’empirer la situation, avec l’élève en retard ET avec toute la classe qui est déjà au travail. Si l’élève n’est pas la cause de son propre retard, il voudrait probablement passer le plus inaperçu en classe, ne pas recevoir de remarque négative de la part de l’enseignant et pouvoir suivre le cours le plus vite possible. Et si l’élève est responsable de son retard, le fait de lui consacrer de l’attention pourrait favoriser ce comportement. Dans les deux cas, il vaut mieux intégrer le plus rapidement l’élève en retard aux apprentissages, sans faire de remarque devant le reste de la classe.



Rentrer le plus rapidement dans les apprentissages

On ne peut pas contrôler les choix de l’élève, mais on peut contrôler notre réaction à ce comportement. Donc comment peut-on réagir ? L’idée est de pouvoir retourner à l’enseignement, à notre cours le plus rapidement possible, en évitant une escalade de comportements négatifs. On veut que l’élève en retard soit le plus rapidement assis, à sa place, en train de travailler comme le reste de la classe.


Pour y arriver, voici 3 étapes à suivre :

1. Rester calme et utiliser un langage non-verbal clair : il n’y a pas de raison de changer d’attitude globale - si nos élèves sont en plein travail, calmes, restons calmes aussi, quelle que soit l’attitude de l’élève en retard. Ce qui est conseillé, c’est d’accueillir l’élève positivement, chaleureusement, mais de manière non verbale (pas besoin de dire “bonjour”, ce qui risque de déranger la classe - un sourire, un signe de tête suffit…). Quand l’élève entre dans une classe calme et au travail, il est beaucoup plus simple de le mettre au travail calmement que si toute la classe est bruyante. Il est donc important de bien gérer la mise au travail en début de cours. L’élève doit savoir où aller et savoir ce qu’il faut faire. S’il n’a que quelques minutes de retard, la routine de début de cours doit être bien intégrée, ce qui lui permet d’être autonome dès son entrée en classe ; il n’a pas de questions à poser, il sait quoi faire. Si l’élève est plus en retard et que la routine est terminée, alors il aura besoin d’être guidé pour savoir quoi faire.


2. Après avoir accueilli l’élève, déposer l’activité à réaliser sur le banc de l’élève pour qu’il puisse se lancer dans le travail demandé immédiatement : l’élève ne peut pas avoir de raisons de ne pas se lancer dans le travail directement. Si on n’est pas réactif, alors l’élève va se mettre à parler avec ses voisins, se balader en classe, puisqu’il ne sait pas ce qu’il faut faire. C’est la parfaite excuse pour traîner ! L’idée est d’enlever toute barrière possible face à la mise au travail de l’élève. Il peut être intéressant d’avoir quelques bics ou crayons avec nous au cas où l’élève n’a pas de quoi écrire, ce qui est encore une excuse potentielle pour ne pas se mettre au travail. Il est plus facile de fournir un bic ou crayon à un élève qui n’en a pas, plutôt que de devoir gérer le fait qu’il n’a pas son matériel pour se mettre au travail.


3. Si l’élève continue à s’agiter sur sa chaise et ne se met pas au travail ou distrait les autres, il faudrait alors s’approcher doucement de l’élève, de manière non conflictuelle ; on va donc parler doucement, s’abaisser pour être au niveau de l’élève et pas au-dessus de lui. On peut lui demander si tout va bien, s’il sait ce qu’il faut faire maintenant, s’il a besoin d’explications, et dire qu’on revient voir dans 5 minutes s’il avance bien dans son travail. Ce genre d’approche permet de ne pas aller vers un conflit, de désamorcer une situation potentiellement tendue et de connecter avec l’élève, plutôt que d’aller vers lui pour lui faire des reproches, ce qui ne risque pas d’être très productif.


S’il l’élève arrive beaucoup plus tard dans la leçon, ou à un moment où on ne peut pas s’arrêter dans le cours pour s’occuper de lui, l’idéal est de créer une routine, une procédure que les élèves connaissent s’ils arrivent en retard. Par exemple, il peut s’agir d’attendre quelques minutes les instructions du professeur, s’installer en silence et attendre que le professeur vienne expliquer, écrire les consignes du cours toujours au même endroit au tableau pour que l’élève sache où les trouver… n’importe quoi qui fonctionne pour toi et ton cours.



Les retards récurrents

Si le souci est plus profond (si le retard est régulier, que la mise au travail ne se fait pas malgré l’approche précédente, si l’élève continue à déconcentrer ses camarades…), alors il faudra adresser le problème en dehors du cours, après la leçon et en privé. Personne ne “gagne” si on essaie d’adresser un problème de ce genre publiquement, devant tous les autres élèves. L’élève ne va pas vouloir “perdre la face” devant son groupe de pairs, et du côté du prof, on perd en crédibilité si on exige des explications sur le retard.


Il est intéressant d’avoir une réelle discussion avec un élève en retard régulièrement, en s’intéressant vraiment à ce qu’il a à dire sur la situation. Par exemple, on pourrait lui dire : “J’ai remarqué que tu arrives souvent en retard en classe, et je voulais voir avec toi comment tu vas. Est-ce qu’il se passe quelque chose qui fait que tu as du mal à être à l’heure ? Je suis là pour t’écouter et pour t’aider si je peux.” Cette approche montre qu’on s’intéresse au bien-être de l’élève et qu’on n’est pas simplement focalisé sur la règle qu’il est en train d’enfreindre quand il est en retard. Ça peut permettre d’ouvrir le dialogue pour découvrir des problèmes cachés, que ce soit relié à l’école, à la maison, aux autres élèves ou encore lié à notre cours spécifiquement.


Une autre stratégie intéressante, c’est de parler à toute la classe en remerciant les élèves qui sont à l’heure d’être à l’heure, et que si des élèves arrivent en retard, ce qu’ils peuvent faire de mieux pour les aider, c’est de ne pas les distraire, de rester concentrés sur leur travail, et qu’on s’occupera après le cours de discuter avec l’élève en retard s’il y a un souci, mais que ça sera en dehors du cours, car avancer dans le cours pour tous les élèves est plus important que de gérer un seul élève.


De manière générale, il est important de montrer aux élèves que leur présence en classe compte pour nous. S’ils ont l’impression qu’il n’y a aucune différence pour nous s’ils sont présents ou non, certains élèves qui sont dans une situation de décrochage scolaire auront tendance à être encore moins motivés à venir au cours, alors que si on peut leur faire ressentir qu’on est contents qu’ils soient là, c’est un premier retour positif qu’ils reçoivent quand ils font l’effort de venir en classe, même s’ils sont en retard.


La prochaine fois que tu donnes cours et qu’un élève arrive en retard, prends une grande inspiration, reste calme et posée, et pense à ce que tu viens d’apprendre aujourd’hui. Respire un grand coup, accueille chaleureusement l’élève en retard, de façon non verbale, et fais tout ce que tu peux pour qu’il puisse s’intégrer aux apprentissages le plus rapidement et le plus calmement possible. Essaie d’éviter les reproches, que ce soit par rapport au retard en lui-même, ou par rapport à la mise au travail décalée. Essayons de partir du principe qu’un élève en retard n’a peut-être pas envie d’être en retard, et qu’il fait tout ce qu’il peut pour être à l’heure… mais que lui non plus n’est pas en contrôle de tous les paramètres entourant cette situation.


Au prochain élève en retard dans ta classe, prends note mentalement de l’effet que cette approche a sur l’élève devant toi : est-ce qu’il réagit différemment de d’habitude ? Est-ce plus facile ou plus difficile de le mettre au travail ?


Encore une fois, ce changement d’approche m’a permis d’être plus posée et moins énervée face au retard des élèves, ce qui ne peut qu’avoir un effet positif sur mon enseignement, d’après moi.

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