Qu'est-ce que la pédagogie active ?

Transcription de l'épisode de podcast :


Dans cet épisode, tu vas découvrir ce qu’est, selon moi, la pédagogie active. Il y a plein de courants différents en pédagogie active, mais tous partagent une vision commune : placer l'apprenant au cœur de son propre apprentissage et envisager l’apprenant dans sa globalité.


La pédagogie active, c'est bien plus qu'une simple méthode d'enseignement. C'est une véritable philosophie qui repense la relation entre l'enseignant, l'apprenant et le processus d'apprentissage lui-même. Elle met l'accent sur l'implication active de l'élève dans la construction de ses connaissances, sa capacité à résoudre des problèmes, à collaborer avec ses pairs et à développer des compétences essentielles pour la vie.


Au fil des années, de nombreux courants ont émergé dans le domaine de la pédagogie active. Certains se concentrent sur l'apprentissage par projet, où les étudiants travaillent sur des projets concrets qui les passionnent, leur permettant ainsi d'explorer en profondeur un sujet tout en développant des compétences transversales telles que la recherche, la communication et la gestion du temps.


D'autres courants privilégient les discussions en groupe, où les apprenants sont encouragés à échanger leurs idées, à confronter leurs opinions et à construire collectivement leur compréhension des sujets étudiés. Cette approche favorise la pensée critique, la communication efficace et l'écoute active.


Il y a également ceux qui préconisent l'apprentissage par l'action, où les étudiants sont amenés à réaliser des expériences pratiques, des simulations ou des jeux de rôle. Ces activités leur permettent d'acquérir des compétences pratiques, de mettre en pratique leurs connaissances théoriques et de développer leur créativité.


Enfin, certains courants de la pédagogie active mettent l'accent sur l'importance de l'autonomie de l'apprenant. Ils encouragent les étudiants à prendre en charge leur propre apprentissage, à fixer leurs objectifs, à évaluer leur progression et à s'engager activement dans leur parcours éducatif.


Je ne vais pas ici m’intéresser à la description exhaustive de tout ce qu’il est possible de faire en pédagogie active - je vais plutôt me contenter d’exposer une vision d’ensemble en te donnant des exemples concret d’activités que tu peux faire en cours de sciences, en pédagogie active.


D’après moi, tout prof qui veut faire de la pédagogie dans ses classes devrait développer des pratiques qui sont de la pédagogie active. Il me semble que de nos jours, en tout cas dans les écoles secondaires, il n’est plus question que le prof se positionne en “unique détenteur du savoir” qui se contente de déverser ses connaissances dans le cerveau des élèves. On essaie tous, d’une manière ou d’une autre, de rendre nos élèves actifs.


Mais c’est quoi exactement, rendre un élève “actif” ?


Un élève actif, ce n’est PAS un élève qui bouge physiquement et qui se balade dans la classe. Un élève actif, c’est un élève qui est actif cognitivement parlant. ça ne veut pas dire que les élèves doivent rester assez sur leur chaise durant tous les cours, mais chercher à faire bouger physiquement un élève n’est pas rendre un élève actif.


Ton rôle de prof, ça va donc être d’imaginer des séquences pédagogiques au cours desquelles le cerveau des élèves va s’activer. Il est donc important de comprendre comment fonctionne le cerveau, et pour cela, il va falloir s’intéresser aux neurosciences. Et c’est là que ça se complique, car ce que prônent les neurosciences n’est pas toujours en accord avec ce que prône la pédagogie active. Je ne vais pas avoir le temps de tout aborder en un épisode, mais j’y reviendrai en détails dans de prochains épisodes. Aujourd’hui, je me contenterai de t’expliquer à quoi peut ressembler une activité en pédagogie active, en essayant de la comparer à une activité similaire qui ne serait pas de la pédagogie active.


En pédagogie active, on essaie de partir du réel, du concret, et si possible des idées des élèves. L’idéal serait donc de partir de leurs questionnements et de leurs idées de réponses pour commencer un nouveau chapitre. C’est assez facile à faire en primaire ou dans les premières années du secondaire, car le programme est très large. Par contre, plus on monte dans les années, plus ça se complique.


Je te donne un exemple concret.

En 1e secondaire, j’ai commencé l’année par partir en excursion, en collaboration avec le prof d’histoire/géo. On a été faire un tour du quartier jusqu’à des espaces verts, ou les élèves ont fait des observations. En classe, on a réfléchi en amont de l’excursion à ce qu’on allait observer pour le cours de sciences : par exemple, on va regarder quelles espèces végétales et animales on identifie durant toute la sortie. De retour en classe, on a dressé ensemble la liste de toutes les espèces qu’ils avaient vues, grâce à leurs notes, on a ensuite réalisé des travaux de groupes pour apprendre à mieux connaitre certaines de ces espèces et on a réfléchi à leurs interactions au sein d’un écosystème.


De mon côté, j’ai toujours eu en tête les parties du programme que je pouvais couvrir avec tout ça, mais en fait j’ai fait croire aux élèves que tout venait d’eux. C’est un peu le rôle du prof de faire le bon mélange entre les idées et intérêts des élèves et ce qu’il faut voir selon le programme.


Evidemment, on ajoute des choses en plus quand les élèves posent des questions qui sont “hors programme”, mais tout ça n’a pas forcément besoin d’être évalué. En tant que prof, ça demande donc d’être à l’aise avec la matière, et aussi d’accepter de dire aux élèves qu’on ne sait pas quelque chose. Lorsque les élèves me posent des questions précises sur certains animaux, je leur réponds sans complexe que je ne sais pas, et qu’il faudrait qu’on cherche la réponse. Si je sais qu’un autre prof de l’école est plus expert que moi dans cette matière en particulier, je n’hésite pas à aller lui poser des question, voir à l’inviter en classe pour qu’il réponde directement aux élèves.


Si je veux comparer cette approche active, qui démarre d’une excursion, avec une approche plus classique, je peux considérer ce qui se fait généralement, car c’est ce qu’on enseigne aux futurs profs : on pourrait aborder la même matière d’une manière qui ne sera pas aussi active en restant en classe et en apportant aux élèves une “situation-problème” ou une situation déclenchante inventée de toute pièce par le prof. C’est certainement plus confortable pour l’enseignant, puisqu’il peut tout préparer aux petits ognons à l’avance, et ça prends probablement moins de temps en classe, mais dans quelques mois ou quelques années, les élèves se souviendront sûrement beaucoup mieux de leur sortie dans le quartier.


Partir d’une excursion est toujours un super point de départ pour lancer une activité. Cette année, j’ai par exemple emmené mes élèves de 4e secondaire sur le terrain pour analyser un écosystème. La biologie n’est pas mon point fort, j’ai donc profité d’avoir un expert à disposition lors de l’excursion pour aller plus loin dans certains sujets que je maitrise moins bien.


Les élèves ont eu une introduction théorique sur les écosystème sur le terrain, puis ils ont pu appliquer ces connaissances en partant à la recherche de différentes espèces. Ils ont pu réaliser que les espèces ne sont pas toutes réparties de manière similaire autour d’un étang et que c’est lié aux différents paramètre physico-chimiques qui ne sont pas les mêmes en fonction de l’endroit où on se situe. Ils ont ensuite pu utiliser une clé d’identification pour déterminer quelles espèces sont présentes dans l’étang et déterminer la qualité de l’eau de l’étang.


J’ai vu des élèves qui sont souvent très peu motivés en cours de sciences sous un tout autre jour lors de cette sortie.

Si j’avais voulu réaliser les mêmes apprentissages en classe, en leur expliquant ce qu’est un biotope, une biocénose, les facteurs abiotiques et biotiques et tout ce vocabulaire pas forcément passionnant en théorie, je suis sûre qu’ils se seraient tous endormis.


En 5e secondaire, j’ai réalisé des savons avec mes élèves de chimie. Plutôt que de leur donner une recette toute faite, je leur ai proposé de concevoir leur propre recette avec les ingrédients qu’ils avaient à disposition. C’est pour moi une façon d’aller chercher encore plus d’activité puisqu’ils doivent apprendre à utiliser un calculateur de recette. Certains élèves ont obtenus de magnifiques savons qu’ils ont pu ramener chez eux, mais d’autres élèves n’ont pas réussi à être assez précis et rigoureux et n’ont pas pu obtenir de savon correct. On a pu tester ensemble le pH des savons après séchage et démoulage et ils ont vu concrètement comment réaliser une réaction de saponification.


Même si je ne suis pas sûre qu’ils se souviennent de l’équation chimique de la saponification, je sais qu’ils se souviendront de cette séance même dans plusieurs années. Alors que se contenter d’aborder théoriquement la réaction de saponification n’est de nouveau pas ce qu’il y a de plus actif.


Prenons un dernier exemple. Imagine que tu enseignes les lois du mouvement et que tu souhaites que tes élèves comprennent le concept de force. Au lieu de simplement leur donner des définitions et des formules à apprendre, tu peux organiser une activité pratique et interactive. Divise tes élèves en petits groupes et donne-leur une tâche à réaliser : par exemple, construire un chariot propulsé par un élastique. Leur objectif sera de faire avancer le chariot sur une distance donnée en utilisant l'énergie élastique.


Pendant l'activité, les élèves devront travailler en équipe, concevoir, expérimenter et ajuster leur chariot pour optimiser sa performance. Ils devront prendre en compte des facteurs tels que la tension de l'élastique, la masse du chariot, la friction et d'autres variables physiques. En observant les résultats de leurs expériences, ils pourront comprendre les principes de base de la force, de l'énergie cinétique et de la conservation de l'énergie.


Dans une approche plus traditionnelle, l'enseignant pourrait donner un cours magistral sur les lois du mouvement et fournir des exemples théoriques aux élèves. Les élèves pourraient ensuite résoudre des problèmes sur papier ou effectuer des exercices en utilisant des formules pour calculer les forces dans différentes situations.


La principale différence entre les deux approches réside dans l'engagement et l'interactivité des élèves. L'activité en pédagogie active permet aux élèves d'expérimenter directement les concepts physiques, de manipuler des objets réels et d'observer les résultats de leurs actions. Ils sont impliqués activement dans leur propre apprentissage, ce qui les motive et renforce leur compréhension des concepts abstraits.


En revanche, l'approche traditionnelle se concentre davantage sur la transmission de connaissances de l'enseignant aux élèves, avec moins d'opportunités pour l'expérimentation et la découverte autonome.


L'activité en pédagogie active offre un contexte plus concret pour l'apprentissage de la physique. Les élèves sont encouragés à poser des questions, à explorer différentes approches et à collaborer avec leurs pairs. Ils développent ainsi des compétences pratiques, telles que la résolution de problèmes, la pensée critique et la communication, en plus d'acquérir une compréhension approfondie des concepts physiques.


En utilisant des activités en pédagogie active, tu offres à tes élèves une expérience d'apprentissage plus immersive, engageante et significative, qui favorise leur développement global en tant qu'apprenants.


Les expériences et les excursions sont des points de départs évidents pour rendre un apprentissage plus actif. Mais il y a également de nombreux cours où il faut voir des formules compliquées et apprendre aux élèves à résoudre des exercices. Et là, on pourrait se dire qu’on n’a pas trop de choix… Pourtant, la façon dont on mène nos séances d’exercices peut aussi se révéler plus ou moins active.


Résoudre nous-mêmes les différents exercices aux tableau, ou donner une feuille d’exercices aux élèves et les laisser résoudre les exercices eux-mêmes pendant un ou deux cours, est-ce que c’est réellement efficace ? Il y a plusieurs choses qu’on peut mettre en place pour essayer de favoriser l’activité cognitive des élèves dans ces moments-là :

- on peut proposer des exercices de niveaux différents, pour que les élèves plus lents ou plus faibles puissent s’entrainer sur des exercices simples et prendre confiance avant de s’attaquer à des exercices plus difficiles, mais aussi pour permettre aux élèves rapides de ne pas s’ennuyer et de s’attaquer à des problèmes complexes

- on peut fournir aux élèves le correctif détaillé des exercices qu’on leur donne pour qu’ils soient plus autonomes et puissent obtenir un feed-back immédiat à la fin d’un exercice. Cela permet également aux élèves qui en ont besoin d’avoir un modèle détaillé de la méthode à suivre pour résoudre un exercice

- on peut inciter les élèves à travailler en groupe, que l’on crée nous-mêmes ou pas en fonction du degré de maturité et d’autonomie des élèves. On peut inciter les élèves à s’entre-aider, en proposant aux meilleurs élèves d’expliquer aux élèves moins bons comment résoudre tel ou tel exercice

- une autre façon de travailler l’exercisation peut aussi être de demander aux élèves de rédiger eux-mêmes un exercice, ainsi que le correctif. ça permet de trouver de nouvelles idées d’exercices et d’alimenter ton fichier d’exercices d’année en année !

- finalement, comme un élève ne sait pas rester concentré longtemps sur une même tâche, il faudrait éviter de faire de trop longues séances d’exercices, d’autant plus avec les plus jeunes élèves. Varier les activités régulièrement et donc espacer les séances d’exercices permet de maintenir l’attention et la motivation des élèves, et le bonus là-dedans c’est que le cerveau retient mieux lorsque les répétitions d’un même apprentissages sont espacées dans le temps !


Une pédagogie active est donc plutôt un état d’esprit à avoir tout au long de ton enseignement. Il n’est probablement pas possible de proposer des activités en pédagogie active à chaque heure de cours, d’autant plus lorsqu’on débute ou lorsque les élèves n’y sont pas habitués. Mais rien ne t’empêche d’essayer de nouvelles façons d’enseigner qui soient plus actives, d’essayer de changer une petite chose dans chaque séance pour que l’élève ai un peu plus son mot à dire et que le prof soit un peu moins en contrôle total de ce qu’il se passe dans sa classe.


J’espère que cet épisode t’as permis de comprendre un peu mieux ce que peuvent être des activités en pédagogie actives dans les cours de sciences. Peut-être que tu as réalisé qu’en fait, tu fais déjà de la pédagogie active ! Et si jamais tu veux te lancer, j’espère que tu as trouvé quelques idées pour avancer. Un dernier conseil : ne te met pas la pression si tu donne encore des cours en mode “ex cathédra”, particulièrement dans les dernières années du secondaire. Il m’arrive encore souvent de faire un cours tout à fait transmissif, et finalement les élèves sont contents aussi dans ces moments-là. Cela demande du temps et beaucoup d’énergie de concevoir des séquences de cours en pédagogie active. Et tu vas voir que ça n’est pas toujours si profitable que ça, du point de vue des apprentissages dans ta matière. Mais ça, ça sera pour un prochain épisode !

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