C’est quoi, apprendre ?

Aujourd’hui, j’aimerais revenir à la source de tout ce qu’on essaie de faire avec nos élèves : leur apprendre quelque chose.


Mais au fait, c’est quoi, “apprendre” ?


L’apprentissage, c’est quelque chose qui se passe dans le cerveau. J’aimerais donc revenir sur le fonctionnement du cerveau, d’un point de vue biologique, pour comprendre les mécanismes qui permettent l’apprentissage. On va donc replonger dans nos cours de biologie et prolonger cette exploration avec un peu de neurosciences pour arriver à comprendre comment le cerveau se comporte lors d’un apprentissage.


Mine de rien, c’est quand même à la base de TOUT ce qu’on fait en tant que prof. Il me semble donc important qu’on connaisse tous les mécanismes derrière l’apprentissage, que ce soit du côté des profs, ou du côté des élèves.


Le cerveau

Le cerveau est composé de plusieurs types de cellules, dont les neurones, qui sont les cellules qui vont nous intéresser aujourd’hui. Un neurone, c’est une cellule qui comprend plusieurs parties :

- un noyau duquel partent des dendrites, qui sont comme des branches qui se divisent en branches plus petites, puis en branches encore plus petites. Les dendrites sont connectées à d’autres neurones et reçoivent de l’information. Elles constituent la matière grise du cerveau.

- un axone, qui est le prolongement du centre du neurone (où se trouve le noyau) : c’est comme une seule longue branche avec une terminaison en arborescence égalementL’axone va se connecter à d’autres neurones et envoyer de l’information.

- à la rencontre entre l’axone d’un neurone et la dendrite d’un autre neurone, c’est ce qu’on appelle une synapse. C’est un petit espace vide.

Pour qu’un neurone communique avec un autre neurone, il doit lui envoyer des molécules, qu’on appelle des neurotransmetteurs. Ces neurotransmetteurs traversent la synapse et sont réceptionnés par le neurone récepteur, au niveau de ses dendrites.


Les neurotransmetteurs peuvent envoyer un signal positif → ils sont alors excitateurs, ou un signal négatif → ils sont alors inhibiteurs. Pour qu’un neurone soit activé, il faut que la somme de signaux reçus par tous les neurotransmetteurs soit positive, et qu’elle dépasse un certain seuil critique. Si ce seuil est dépassé, alors un influx nerveux est généré par le neurone.


Comme un neurone est connecté à des milliers d’autres neurones, l’activation d’un neurone particulier dépend de l’activité de plein d’autres neurones.


Dans notre cerveau, les neurones sont interconnectés les uns avec les autres. Mais ces connexions ne sont pas fixes ; elles évoluent au cours de notre vie. Lorsque nous sommes enfants, nous avons peu de connexions. Plus nous apprenons, plus il y a de nouvelles connexions, ou de connexions renforcées, entre les neurones.


Apprendre, c’est donc créer ou renforcer des connexions entre neurones.


Comment peut-on être sûr de ça ?

Parce qu'on arrive à prendre des images précises de notre cerveau. C’est assez récent, du coup ces savoirs ne sont pas encore très répandus parmi les enseignants, puisqu'il faut toujours un certain temps entre la découverte faite par des scientifiques, sa vulgarisation et enfin sa diffusion auprès du public concerné.


Pour prendre des images de notre cerveau, on utilise l’imagerie par résonnance magnétique. Avec cette technique, on peut visualiser la quantité de matière grise dans chaque zone du cerveau. Si on se souvient que la matière grise correspond aux dendrites, on comprend que la matière grise correspond aux connexions entre les neurones.


Ce qu'on a fait comme expériences pour arriver à la conclusion que l’apprentissage, c’est faire des connexions entre neurones, c’est qu'on a pris des images du cerveau de certaines personnes avant un apprentissage spécifique, et après l’apprentissage, et qu'on a observé une augmentation de matière grise dans la zone du cerveau concernée par cet apprentissage. Ces changements dans la quantité de matière grise peuvent être observés après seulement quelques heures d’apprentissage !


On a, par exemple, demandé à certaines personnes d’apprendre à jongler et de s’entraîner régulièrement pendant plusieurs mois. On a constaté une augmentation de matière grise, mais ce qui est encore plus surprenant, c’est que lorsque ces personnes arrêtent de jongler, donc qu’elles n’utilisent plus leur nouvel apprentissage pendant plusieurs semaines, on observe une diminution de matière grise ; le cerveau va petit à petit revenir à son niveau initial de matière grise.


Cela veut donc dire qu’apprendre crée de nouvelles connexions entre neurones, mais que si on n’utilise plus un apprentissage, on peut tout à fait perdre ou affaiblir ces connexions, et donc “désapprendre”. Donc si on te dit qu'il est impossible de désapprendre quelque chose, c’est faux : si on n’utilise plus un apprentissage, les connexions vont petit à petit se défaire dans le cerveau. Pour ne pas pouvoir être désappris, un apprentissage doit être extrêmement bien ancré en mémoire à long terme. Et on va voir tout de suite comment faire pour y arriver.


Je vais te parler de 5 grands principes pour favoriser l’apprentissage :

- activer les neurones liés à l’apprentissage visé

- activer les neurones de manière répétée

- entraîner la récupération en mémoire

- élaborer des explications

- espacer l’activation des neurones


Lorsqu'on conçoit nos séquences d’apprentissage, nos cours et nos interactions avec les élèves, on devrait donc toujours garder ces grandes lignes en tête.


Explorons chacun de ces principes plus en profondeur pour voir ce que tu peux faire concrètement dans tes classes pour les favoriser.



1) Activer les neurones liés à l’apprentissage visé

Pour apprendre, il ne suffit pas simplement d’activer des neurones au hasard ; il faut activer les neurones liés à ce qu’on veut faire apprendre à nos élèves. Un élève peut être très actif dans sa tête, mais sur totalement autre chose que ce qu’on vise en tant qu’enseignant.


En plus, des neurones qui s’activent ensemble vont se connecter ensemble. Ça veut dire que si un élève active en même temps plusieurs neurones, ils vont avoir tendance à se réactiver ensemble la prochaine fois qu’un des neurones est activé. Donc, on voudrait favoriser l’activation de plusieurs neurones qui permettent de connecter un nouvel apprentissage à un ancien apprentissage, et éviter que des neurones liés à l’apprentissage s’activent en même temps que des neurones de “distraction”, sinon à chaque nouvelle activation, la distraction aura plus de chance de s’activer à son tour.

Il faudrait donc que l’attention des élèves soit tournée vers l’apprentissage visé, et uniquement là-dessus. Pour arriver à faire ça, il faut éviter d’utiliser des approches passives, où l’élève doit par exemple écouter de manière passive ou lire un texte de manière passive. Il faut au contraire favoriser des approches actives, en donnant quelque chose à faire à l’élève lorsqu’il écoute ou lorsqu’il lit.


Il faut essayer d’éviter au maximum les sources de distraction, comme les smartphones qui n’ont pas leur place en classe, ou qui devraient être placés dans une autre pièce lorsque l’élève étudie à la maison. Une décoration trop présente dans une salle de classe peut aussi se montrer source de distraction et devrait donc être minimisée. Les élèves doivent également éviter le multitâche qui n’est pas efficace pour apprendre.


Si des neurones non liés à l’apprentissage sont activés, comme par exemple en faisant appel à des conceptions erronées ou simplement en pensant tout à fait à autre chose, cela ne favorisera pas l’activation des neurones visés, et donc l’apprentissage sera moins bon.


Il est intéressant aussi de réaliser que le contexte d’un apprentissage est important. Lorsqu’on apprend quelque chose, on se trouve dans un contexte particulier (assis sur une chaise, dans une salle de classe, par exemple). Les neurones activés durant un apprentissage vont s’activer en même temps que des “neurones de contexte”, et s’ils s’activent en même temps, ils vont se connecter. Donc, pour réactiver les neurones de l’apprentissage visé, c’est plus facile si on est dans le même contexte, puisque les neurones de contexte vont à nouveau s’activer, et qu’ils sont maintenant liés aux neurones de l’apprentissage. Il est donc plus facile de réactiver ses connaissances quand on est dans le même contexte que durant l’apprentissage.



2) Activer les neurones de manière répétée

Activer ses neurones à une reprise ne suffit pas pour ancrer un apprentissage ; il faut activer ses neurones de manière répétée. À chaque nouvelle activation, les connexions neuronales vont se renforcer, et il sera donc de plus en plus facile d’activer un réseau de neurones particulier. Cela permet donc de consolider un apprentissage.


Lorsqu’une connexion entre neurones n’est plus utilisée, on a déjà vu qu’elle va diminuer, puis disparaître. C’est le phénomène de l’oubli. Activer les neurones de manière répétée permet donc de s’assurer de ne pas oublier quelque chose, en renforçant les connexions entre neurones.


Ce renforcement des connexions permet de diminuer la charge mentale, puisque l’activation d’un réseau de neurones va se faire de manière de plus en plus automatique lorsque les connexions se renforcent ; on n’a plus à penser à chaque chose séparément, c’est l’apprentissage global qui s’active directement.


Le cerveau est une forêt

Pour mieux visualiser ce dont je parle, on peut réaliser une analogie entre le cerveau d'un apprenant et une forêt. Une forêt densément peuplée rend la marche difficile. Pour se déplacer dans une telle forêt, on doit utiliser ses bras et ses jambes pour débroussailler devant soi et créer un nouveau chemin.


Plus un chemin va être utilisé, plus il sera dégagé et plus il sera facile de l'utiliser. Un chemin fortement emprunté deviendra donc une voie de passage privilégiée. Il en va de même dans le cerveau : lorsqu'un "chemin" entre neurones est utilisé régulièrement, il devient une voie privilégiée. Ce "chemin" constitue un réseau de neurones, qui se construit de façon similaire aux chemins dans une forêt.


Si un apprenant cesse d'utiliser un chemin, celui-ci va petit à petit disparaître, tout comme un sentier non utilisé en forêt sera envahi petit à petit par la végétation. Pour le conserver, il faut régulièrement l'emprunter pour le conserver praticable, en taillant la végétation par exemple. C'est pareil dans son cerveau : il faut régulièrement utiliser nos réseaux de neurones pour les conserver sur du long terme, sinon les connexions neuronales s'affaiblissent, et finissent par disparaître. Ce qui est utilisé est conservé et renforcé - ce qui n'est pas utilisé s'affaiblit et disparaît.


Use it or lose it


Cette analogie permet aussi de comprendre pourquoi il est difficile de corriger certaines erreurs. Lorsqu'un grand sentier est présent en forêt et semble amener à la destination choisie, il est logique de vouloir l'emprunter, plutôt que de traverser la forêt sauvage. C'est plus rapide et plus facile. Mais si ce sentier ne mène pas à la destination voulue, il faudra tout de même passer à travers la végétation pour arriver à destination. Après être passé quelque fois par ce nouveau sentier, il devient de plus en plus praticable, mais le grand sentier initial, menant à une mauvaise destination, est toujours présent, et beaucoup plus attirant. Cela demande donc un effort conscient de se dire qu'on va emprunter le nouveau petit sentier, plutôt que de continuer à prendre son sentier habituel.

Il faut apprendre à prendre de nouveaux sentiers, mais aussi désapprendre d'anciens chemins, ce qui est particulièrement long et compliqué, car dès qu'on reprend une fois l'ancien sentier, il est réactivé.


Pour activer les neurones de façon répétée, on peut utiliser les stratégies suivantes :

- Il faut planifier plusieurs moments d’activation pour maximiser le nombre d’activations dans un temps donné. La répétition est donc nécessaire.

- Il faut éviter de s’entraîner trop longtemps, car à la longue le cerveau s’habitue si on fait trop longtemps la même chose et les neurones ne sont plus activés. Quand une tâche devient trop facile, il faut l’arrêter car il n’y a plus d’apprentissage. On est alors en train de perdre son temps.

- Il faut se forcer à réaliser un surapprentissage, c’est-à-dire continuer à s’entraîner même lorsqu’on a compris quelque chose. C’est cela qui permet l’automatisation des procédures et qui réduit la charge mentale.

- Il faut absolument éviter de répéter une erreur, sinon on renforce ce chemin-là dans notre cerveau, et c’est très difficile de se construire les “bons chemins”, les bonnes connexions neuronales ensuite. Il faut donc s’assurer que les élèves aient de bonnes bases.


Concrètement, il est donc indispensable de faire beaucoup de séances d’exercices. La répétition n’est pas suffisante à un apprentissage, mais elle est absolument nécessaire, que ce soit pour résoudre des exercices mais aussi pour résoudre ensuite des tâches complexes.


Cependant, tout le monde n’a pas besoin du même temps d’exercisation. Le temps nécessaire dépend des connaissances initiales des élèves et de la méthode utilisée.


Une fois que les connexions neuronales voulues sont présentes et ont été entraînées, on peut ensuite faire des activités de découverte ou des tâches complexes. Mais il faut d’abord s’assurer que les neurones voulus vont s’activer ensemble.



3) Entrainer la récupération en mémoire

La récupération en mémoire, c’est le fait de faire activement l’effort de se remémorer quelque chose. Il faut faire l'effort de se souvenir d'une connaissance à plusieurs reprises. Cela active les neurones ensemble et donc améliore l'apprentissage.


Pour forcer les élèves à faire de la récupération en mémoire, la meilleure solution est de faire des évaluations. À chaque évaluation, l’élève doit faire l’effort d’aller récupérer l’information demandée.


En plus d’améliorer globalement l’apprentissage de tous les élèves, on constate que plus on fait de tests, donc de périodes de récupération en mémoire, plus le pourcentage de rappel des élèves plus faibles rejoint celui des élèves plus forts. Donc réaliser beaucoup de récupération en mémoire permet de diminuer les inégalités. Il vaut donc mieux faire plein de tests plutôt que de passer ce temps-là à étudier sans être testé.


L’utilisation de tests fréquents est souvent mal vue en enseignement. On imagine que les élèves ne vont pas aimer ce genre de cours s’ils ont tout le temps des évaluations et que ça va augmenter leur stress d’être tout le temps testés. Mais ce que les études ont montré, c’est que les élèves préfèrent avoir des tests fréquents, plutôt que quelques tests ponctuels → ils apprennent mieux, suivent mieux le cours, aiment davantage le cours, ils sont moins anxieux lors des examens.


L’autre argument vient plutôt du côté des profs, qui voient le fait de faire beaucoup d’évaluation comme une perte de temps. Il reste effectivement moins de temps pour “faire cours” normalement. Mais ce qu’il faudrait, c’est plutôt un changement complet de paradigme autour de l’utilisation de l’évaluation. Plutôt que de voir l’évaluation comme la finalité d’un apprentissage, il faudrait plutôt la considérer comme une partie intégrante de l’apprentissage, puisqu’on voit que c’est lors des phases de test, de récupération en mémoire, qu’une grande partie de l’apprentissage peut se faire.


Si tu as écouté les épisodes précédents où je te parle des facteurs qui influencent l’apprentissage, tu te souviens peut-être que l’efficacité d’une technique est facilement donnée grâce à la valeur “d”, et que si cette valeur de “d” est positive, la technique a un effet positif, mais que pour être significativement positive, il faut que cette valeur soit supérieure à 0,4. L'ampleur moyenne de l'effet de la récupération en mémoire est de 0,74. C’est donc une technique très efficace. Pour rendre ça encore plus efficace, il faut varier le type de question utilisé pour faire de la récupération en mémoire. Et si on va regarder en détail pour quels élèves c’est le plus efficace, ce sont les élèves du secondaire qui profitent le plus de cette technique (d = 0,83 contre d = 0,64 en primaire et d = 0,60 au post-secondaire).


En plus des tests, on peut également favoriser la récupération en mémoire en posant des questions aux élèves. Lorsqu’on a 25 élèves ou plus dans nos classes, il est compliqué de laisser la possibilité à chaque élève de répondre oralement. On peut donc s’aider d’applications numériques pour récolter les réponses de tous les élèves et pour ensuite faire un retour sur l’ensemble des réponses.

Lorsqu’on pose des questions aux élèves, il est important de leur laisser du temps pour trouver la réponse. Il faudrait toujours laisser quelques secondes de silence après une question pour que chacun puisse faire l’exercice d’aller récupérer l’information dans sa mémoire. Si l’élève n’y arrive pas, on peut alors l’aider en lui donnant un indice pour le guider, pour essayer d’activer des neurones connectés aux neurones visés, afin de faciliter son activation.


Enfin, pour être efficace, la récupération en mémoire doit être suffisamment difficile pour activer les neurones, mais elle ne doit pas être trop difficile sinon elle augmente le risque d'erreur. Il faut donc trouver un juste milieu.



4) Élaborer des explications

Élaborer des explications, c'est aller récupérer des informations en mémoire et les mettre en lien avec d'autres connaissances. Cela permet donc d'activer les réseaux de neurones liés à un nouvel apprentissage et de renforcer les liens avec d'autres neurones, liés à des apprentissages plus anciens. Cela permet donc une activation plus facile par la suite.


L'ampleur moyenne de l'effet de l'élaboration d'explication est de 0,55, il est donc moindre que celui de la récupération en mémoire, mais reste meilleure que l’utilisation de méthodes actives, par exemple.


Un facteur a un effet important sur l'impact de l'élaboration d'explication : les connaissances antérieures. Avec beaucoup de connaissances antérieures, on réalise de meilleures explications. Si les connaissances antérieures sont erronées, les explications risquent d'être erronées également. Il vaut mieux éviter complètement l'utilisation de l'élaboration si les connaissances antérieures sont limitées ou erronées, et s'assurer de donner un feedback immédiat à l’élève pour corriger l'explication si besoin, et ne pas ancrer une erreur qui, on l’a déjà dit plus tôt, sera très difficile à effacer de son cerveau.


Pour utiliser l’élaboration d’explication, il faut essayer de développer l'habitude de se parler à soi-même lors d'un apprentissage, de s'auto-expliquer les choses. C’est difficile à faire en classe, car si tous les élèves se parlent à eux-mêmes, ça risque de devenir un beau bordel. C’est donc une pratique qui serait plus intéressante à pratiquer à domicile, lorsque les élèves étudient pour préparer une évaluation, par exemple. Mais pour qu’ils sachent que ça existe, il faut le leur dire, et même leur montrer comment faire, en classe.


Ce qu’on peut faire durant le cours, c’est questionner les élèves avec des questions de types "pourquoi" et "comment", qui favorisent l'élaboration d'explications. Plutôt que de simplement leur demander de se rappeler quelque chose, on enchaîne directement avec une question qui leur demande de formuler une explication : pourquoi c’est comme ça ? pourquoi c’est vrai ce que tu me dis ? comment peux-tu le savoir ?



5) Espacer l’activation des neurones

Activer les neurones visés, de manière répétée, c’est bien pour commencer. Mais l’activation espacée, c’est mieux. En consacrant le même temps à un apprentissage, mais en répartissant mieux dans le temps les séances de travail, on apprend mieux. On peut donc mieux apprendre sans travailler plus ; c'est génial !


On a déjà dit qu’il ne faut pas travailler trop longtemps sur la même chose, sinon le cerveau s'habitue et n'active plus les neurones ; on travaille mais on n'apprend plus. La solution pour continuer à activer nos neurones, c’est donc d’espacer les moments d’activation.


Mais si on attend trop longtemps entre deux réactivations, on risque d’oublier. Il devrait donc exister une durée idéale d'espacement entre deux séances de travail. Cette durée idéale n’est pas absolue ; elle dépend de la durée de rétention voulue. Si on veut se souvenir de quelque chose plus longtemps, les séances de réactivation doivent être plus espacées.


Si on espace nos moments de travail de 24h, on profite de toute façon d’un mécanisme automatique : on va dormir entre deux séances. Lors de notre sommeil, le cerveau réactive les neurones qui ont été activés pendant la journée. En espaçant les moments de travail sur plusieurs jours, on profite donc de cette activation "gratuite". Ces activations sont inconscientes mais elles participent au renforcement des connexions entre neurones, et donc à l'apprentissage.


Pour appliquer ce principe à l’école, il y a plusieurs stratégies possibles :


- Distribuer les périodes d'apprentissage : travailler plus souvent mais moins longtemps. Par exemple, on peut donner des petits devoirs à nos élèves pour qu’ils activent les neurones liés à notre cours lorsqu’on ne les voit pas, on peut espacer les différentes séances de cours dans l'horaire et donc éviter de regrouper plusieurs heures d’un même cours, même si ce n’est pas souvent la tendance choisie car cela peut compliquer la réalisation des horaires. Dans l’idéal, il faudrait aussi éviter de regrouper toutes les heures d'un même cours en début ou en fin de semaine par exemple, pour espacer de manière régulière les différents moments de cours.


- Augmenter progressivement l'espacement entre deux réactivations : au début d’un apprentissage, on va essayer de réactiver très vite les neurones, on recommence la même chose de manière rapprochée, puis on espace de plus en plus. Au début, les connexions sont nouvelles et fragiles ; il faut vite répéter pour les ancrer.


- Entrelacer les apprentissages : plutôt que de se focaliser sur un seul apprentissage à la fois, on mélange les apprentissage. On peut le faire de différentes manières :subdiviser les périodes d'apprentissage : au sein d'une même période de cours, faire plusieurs moments avec plusieurs objectifs différents
mélanger les types d'exercices : pas au début d'un apprentissage sinon c'est trop compliqué, les automatismes ne sont pas encore ancrés, mais lors des révisions, plus efficace de mélanger les différents types d'exercices. Cela permet un plus grand espacement entre les activations, et donc la récupération en mémoire est plus efficace car plus exigeante


- Revenir sur des contenus vus précédemment : on peut utiliser une petite partie du cours pour faire des rappels sur de la matière ancienne, ou on peut ajouter des exercices des chapitres précédents lors de chaque évaluation, dans le but d’activer à nouveau les neurones d'anciens apprentissages pour ne pas les oublier

- Résister à l'intuition selon laquelle le regroupement serait plus efficace : les apprenants pensent mieux apprendre en regroupant l’apprentissage, mais c'est faux! Lorsqu'on regroupe des exercices de même nature, leur résolution est plus facile sur le moment, lors de l'entraînement, mais les résultats lors du test sont moins bons que lorsqu'on espace → crée un faux sentiment d'efficacité

Apprendre, c’est faire un effort. L’intuition des élèves n’est donc pas toujours correcte. Lorsqu’un cours semble désagréable, difficile, l’intuition première d’un élève va être de râler, de se plaindre de la difficulté, plutôt que de réaliser qu’il apprend mieux justement grâce à cette difficulté.


Lorsqu’un élève se plaint en cours en disant qu’il ne comprend rien ou que c’est dur, c’est en fait bon signe ; ça veut dire qu’il apprend ! C’est son cerveau qui lui envoie le signal qu’il doit faire des efforts, et faire des efforts, c’est consommer des ressources (du sucre, par exemple). Mais le cerveau a tendance à être le plus économe possible en ressources, il va donc envoyer le signal de se préserver. Malheureusement, l’apprentissage n’est pas possible sans faire l’effort de se rappeler les choses, il faut donc aller contre la flemme de son propre cerveau, ce qui n’est pas facile.



Voilà, on arrive au bout de l’épisode du jour.


Pour réactiver encore une fois tes neurones, je te fais un mini-résumé express de ce que tu viens d’apprendre :


Le cerveau contient des neurones, qui se lient à d’autres neurones lors d’un apprentissage. Des neurones qui s’activent ensemble vont renforcer leur connexion. Tout apprentissage n’est que ça : des nouvelles connexions, ou des connexions renforcées entre neurones.


Il y a 5 grands principes pour favoriser l’apprentissage :

- activer les neurones liés à l’apprentissage visé : il faut rendre l’élève actif, éviter les sources de distraction et éviter d’activer d’autres neurones que ceux liés à l’apprentissage.

- activer les neurones de manière répétée pour renforcer les connexions, diminuer la charge mentale et réduire l’oubli. Souviens-toi de l’analogie entre le cerveau et une forêt, dans laquelle on crée des chemins. Pour renforcer ces chemins, ces connexions, il faut s’entraîner, s’exercer, éviter les erreurs et ne pas oublier d’aller jusqu’à un surapprentissage pour créer des automatismes et réduire la charge mentale.

- entraîner la récupération en mémoire en posant des questions et en réalisant un maximum d’évaluations

- élaborer des explications, mais son effet dépend fortement des connaissances antérieures. Il faut encourager les élèves à s’auto-expliquer les choses quand ils étudient.

- espacer l’activation des neurones : au début d’un apprentissage, les répétitions sont rapprochées, puis, on espace de plus en plus les répétitions. Il faudrait avoir le plus de petits moments de travail et varier les modalités au sein d’une séance de cours pour travailler différentes choses.


Ce fonctionnement général des neurones, il est le même dans tous les cerveaux, et dans toutes les parties du cerveau. Le cerveau, c’est donc simplement une accumulation de connexions entre neurones. Et ces connexions, c’est ce qui crée notre mémoire. Pour compléter cet article, qui est focalisé sur l’activation des neurones, tu peux lire l'article suivant qui aborde les différents types de mémoire et comment elles nous aident à apprendre.

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